- SÉLECTION DE LA RÉDACTION
- 2010 · 5 morceaux · 28 min
Partita pour violon nº 2 en ré mineur
Bien que Bach soit sans doute le plus grand claviériste de son époque, il a commencé sa carrière en tant que violoniste. Il préférait diriger l’orchestre de Köthen depuis la section des cordes et, grâce à son amitié avec des musiciens comme Westhoff et Pisendel, il appréhendait parfaitement l’instrument. Réunies dans un manuscrit daté de 1720, les six Sonates et Partitas pour violon seul (BWV 1001–1006), sans accompagnement de basse, permettent de saisir à quel point cette compréhension était profonde. Véritables pinacles de la tradition allemande du violon, ces pièces jettent un regard attentif sur les développements réalisés en Italie, et comprennent trois Partitas confirmant la souveraineté dansante des Suites françaises — elles-mêmes composées pour le clavecin — , et trois Sonates obéissant aux standards de l’« Église » italienne, alternant mouvements lents (ou presque) et mouvements rapides. Avec sa robuste « Allemande », sa « Courante » sautillante, sa « Sarabande » doloriste et sa « Gigue » toute en fluidité, la Partita pour violon seul en ré mineur (BWV 1004) se conforme impeccablement au modèle de suite de danses traditionnelles développées avec les Suites françaises. Ce qui se passe ensuite, cependant, est aussi inattendu que bouleversant sur le plan émotionnel : Bach couronne un édifice déjà imposant par une « Chaconne » finale, soit un ensemble de 64 variations, tour à tour intimistes, confidentes, exubérantes et d’une virtuosité à couper le souffle. Construite sur un motif harmonique récurrent, énoncé initialement en accords angoissés, cette « Chaconne » s’organise en trois longs paragraphes autour du réconfort d’une section centrale béatifique en ré majeur qui s’anime progressivement. Rétrospectivement, c’est comme si tout dans la Partita avait conduit à ce mouvement. Ainsi la « Sarabande » préfigure-t-elle certains aspects de ses préoccupations harmoniques, mais aussi nombre de ses intentions mélodiques. Et la « Gigue », malgré son rythme soutenu, évite de voler la vedette à la tempétueuse « Chaconne » en restant délibérément lisse dans ses contours. Des indices disséminés dans la Partita et inscrits dans certaines références chorales suggèrent un sous-texte relatif à la Passion du Christ. Pourtant, il se pourrait bien que, écrite après que Bach ait découvert, au retour d’un voyage, que sa femme était décédée et déjà enterrée, la « Chaconne », traversée par des pensées de mort et de résurrection, serve aussi de tombeau chargé de chagrin à sa mémoire.
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